CELLES QUI AIMENT ELLES

Elles se tiennent la main

En secret sous leur veste
Se caressent des yeux
Sans un geste
On lit sur la photo
Où elles sourient, tranquilles
Juin 1950 à Belle-Île
C'était pas facile dans ces années-là
Et en ville on en parlait tout bas
Les mots de haine,
Ceux qu'on entend à peine
Les ont fait pleurer bien des fois
Suivre le modèle
Impossible pour celles
Qui aiment elles
Et moi qui sais le prix
De leurs amours rebelles
Moi qui suis mi-voyou,
Mi-voyelle
Si j'ai choisi d'aimer
Un triangle isocèle
Je peux vivre au grand jour
Grâce à elle
C'était pas facile dans ces années-là
Et en ville on les montrait du doigt
Les mots qui glissent,
Les regards en coulisse
Les ont fait douter d'elles, quelquefois
Pour toucher le ciel
Elles avaient besoin d'elles
Besoin d'elles
Suivre le modèle
Impossible pour celles
Qui aiment elles
Elles se tiennent la main
En secret sous leur veste
Se caressent des yeux
Sans un geste
On lit sur la photo
Où elles sourient, tranquilles
Juin 1950 à Belle-Île

SOLUTION RADICALE

Kâmasûtra, pranayama
Hypno, sophro, cure d'ananas
Tes sept chakras sont tout cracras
Et ton aura, j' t'en parle pas !
Potion magique, cristal maya
Secrets des moines d'Himalaya
Grigri papou, bave de serpent
Poils de tatou et plume de paon

Ah, ah ! Où est la solution radicale
Ah, ah ! Pour ne plus, ne plus avoir mal ?

Tu pousses des cris de Navajo
Tu traces des traits noirs sur ta peau
Alors tu danses
Et puis tu trans… pires et c'est bien
Tu penses à rien
Contre le stress un séminaire
Câlins, caresses, tout l' monde par terre
C'est du tantra, faut qu' tu t'entraînes
Si ça t' tente pas, essaie le zen

Ah, ah ! Où est la solution radicale
Ah, ah ! Pour ne plus, ne plus avoir mal ?

T'as pas bonne mine, t'es anémié
Vitamines, acides aminés
Stage en Lozère pour le bon air
Chez les bonnes sœurs pour le bonheur
Kâmasûtra, pranayama
Et pour alléger ton karma
Prends un gourou
Un marabout
Et donne-lui tout, tout, tout, tout, tout

Ah, ah ! C'est la solution radicale
Ah, ah ! Pour ne plus, ne plus avoir mal
Ah, ah ! C'est la solution radicale
Ah, ah ! Pour ne plus avoir mal !

Mais t'as mal où, Chouchou ?

LES ASPHODÈLES

Elle soignait ses asphodèles
Et son vieux mari gâteux
En souriant malgré elle
D'un petit air mystérieux
Hum…
Tous les hommes étaient fous d'elle
Et de ses gestes gracieux
Car on entendait la belle
Crier "Oh, mon Dieu, mon Dieu !"
Chaque nuit, sous la tonnelle
Pendant que dormait le vieux

Mais comment s'envoyer en l'air
Et monter au ciel, sans en avoir l'air ?
Oui, comment s'envoyer en l'air
Sans commettre l'adultère
Qui est un péché mortel ?

Elle rangeait sous la tonnelle
Un outil des plus précieux
Pour soigner ses asphodèles
Et jouer à d'autres jeux
Hum…
Un bel outil dont le manche
Était si doux au toucher
De ceux dont la vue déclenche
Parfois d'étranges idées
Et du dimanche au dimanche
Pendant que le vieux dormait

Elle aimait s'envoyer en l'air
Et monter au ciel, sans en avoir l'air
Elle aimait s'envoyer en l'air
Sans commettre l'adultère
Qui est un péché mortel

Elle soignait ses asphodèles
Et son vieux mari gâteux
En souriant malgré elle
D'un petit air mystérieux
Hum…
Souvent je repense à elle
Et je vous l'avoue ici
Moi qui suis tendre et fidèle
Au bel amour de ma vie
J'ai planté des asphodèles
Au cas où, mais oui, mais oui

Elle soignait ses asphodèles
Et son vieux mari gâteux
La la la…

DIS QU'EST-CE QUI M'ARRIVE ?

Dis, qu'est-ce qui m'arrive ?
J' pars à la dérive
Je me sens poussée vers toi
Dis, qu'est-ce qui m'entraîne ?
Je brise les chaînes
Qui me tenaient loin de toi

Laissé sur le quai
L'avant pour l'après
Tout sur un seul coup de dés
Comme la première neige
Je me désagrège
Je fonds, je n'existe plus

Le courant m'emporte
La vague est trop forte
Je ne veux pas m'échouer
J'avance et palpite
Quelle sera la suite ?
J'esquive tous les dangers

Le torrent m'enivre
Vodka dans le givre
Envie légère de danser
Voyage en zigzag
Au milieu des vagues
Plus rien ne peut m'arrêter

Dis, qu'est-ce qui m'arrive ?
J' pars à la dérive
Je me sens poussée vers toi
Est-ce vers ton île
Que le vent des îles
Me déposera dans le soir ?

Là, dans un murmure
Sous le bleu obscur
Tu me diras "C'est ici"
Je poserai mon ancre
Mes pleins et mes manques
Jeté le reste aux orties

Et les algues brunes
Chanteront sous la lune
La la la…
Fermées les persiennes
Si c'est à l'ancienne
On baissera les jalousies

J'en dirai pas plus
Bouche cousue, motus
C'est l'heure de l'incognito
Et la ville autour
Baissera l'abat-jour
La la la…

Dis, qu'est-ce qui m'arrive ?
J' pars à la dérive
Mon cœur, comme un brasero,
Arrive à ta rive
Qu'est-ce qui nous arrive ?
Serait-ce un amour nouveau ?

DES VIEUX QUI DANSENT

C'est beau des vieux qui dansent
Comme l'on danse depuis toujours
C'est beau des vieux qui dansent
Sans se soucier du temps qui court
L'ange caché bat la mesure
Suivez-le, quittez vos chaussures
Dansez, dansez !

[Refrain:]
Loin de leurs souvenirs bons ou mauvais
De leur passé
Ce n'est pas la vie et pas encore l'éternité
L'éternité

C'est beau des vieux qui dansent
Le temps s'étend à l'infini
C'est beau des vieux qui dansent
Sur le chemin du paradis
L'ange caché bat la mesure
En rassemblant les âmes pures
Dansez, dansez !

[Refrain]

C'est beau des vieux qui dansent
Quand ils commencent à s'envoler
C'est beau des vieux qui dansent
On ne peut plus les oublier
L'ange déploie son envergure
Ils disparaissent dans l'azur
Venez, venez, venez !

T'ES MON CHAPLIN

Loin de toi, j'ai le spleen
Y a mes yeux qui prennent l'eau
Reviens, t'es mon Chaplin
Mais t'es pas mon Charlot
Loin de toi, j'assassine
Chaque minute au couteau
Tuer le temps c'est un crime
Quand on l' tue en solo

Tu m'as quittée sans un mot
Pour une star du muet
J' sais plus quoi faire de ma peau
J' veux muer
Le coup d' foudre c'est provisoire
Reste l'orage qui cogne
Viens me faire croire
Que c'est Buster Keaton

Loin de toi, j'ai le spleen
Y a mes yeux qui prennent l'eau
Reviens, t'es mon Chaplin
Mais t'es pas mon Charlot
Loin de toi, je délire
Je cache sous mon chapeau
Des cauchemars en cachemire
Et des rêves en lambeaux

J' passe mes nuits à ranimer
Des photos sans avenir
Comment ai-je laissé filer
Ton sourire ?
Je me sens comme ce Maudit
Qui n' trouva pas ses mots
Et qui toute sa vie
Regretta Garbo

Loin de toi, j'ai le spleen
Y a mes yeux qui prennent l'eau
Reviens, t'es mon Chaplin
Mais t'es pas mon Charlot
J' me repasse ta bobine
Mais c'est moins rigolo
Nappés de naphtaline
Les souvenirs sont pâlots

Loin de toi, j'ai le spleen

COMME DANS LES FILMS ITALIENS

J'ai vécu la Dolce Vita
Et les Drames de la jalousie
J'ai pleuré comme Gelsomina
J'ai ri comme chez Dino Risi
Réalité, Cinecittà
Tout se mélange dans la vie

La vie, c'est comme dans les films italiens
Quand tout va mal, c'est qu' déjà tout va bien
La vie, sérieuse et comique à la fois
Riz amer, Pain et chocolat {x2}

J'ai connu des Vitellonni
Et des Voleurs de bicyclettes
Un Fanfaron, un Incompris
Le Pigeon et la Femme du prêtre
Et tous les chemins de ma vie
Mènent à Rome, ville ouverte

La vie, c'est comme dans les films italiens
Quand tout va mal, c'est qu' déjà tout va bien
La vie, dramatique et drôle, quoi qu'on dise
La Grande bouffe et Mort à Venise {x2}

Mais les Affreux, sales et méchants
Ne font pas toujours la Grande guerre
Un Parfum d' femme et les Tyrans
Prennent une Journée particulière
En Italie pour un enfant
La Vie est belle, même en enfer

La vie, c'est comme dans les films italiens
Quand tout va mal, c'est qu' déjà tout va bien
La vie tragique, oui, ma non troppo
Théorème et Don Camillo

HOBBIES DE FAMILLE

Ma belle-mère a la Pléïade
Mais c' n'est pas une maladie
Mon beau-père boit d' l'orangeade
Puisque c'est lui qui conduit

Mon p'tit frère qui est nomade
Préfère Michelin à Mappy
Notre mère en galéjade
L'a conçu d'un second lit

Ma belle-sœur fait d' l'escalade
Et se dope aux brocolis
Aux carottes en persillade
Avec un tout p'tit peu d' riz

Son mari en est malade
Finalement, il est parti
Pour étudier les peuplades
L'intimité des ethnies

Hobbies, hobbies, hobbies, hobbies, hobbies
Chacun ses tics, chacun ses tocs
Chacun ses tocs, chacun ses tics

Mon neveu qui a mes suffrages
Vit un peu au ralenti
Quand j'ai suivi son sillage
L'herbe m'a rendue flapie

Quant à ma grand-mère volage
Très forte en géographie
De Tripoli à Carthage
Elle a vu vingt ouistitis

Mon grand-père en prit ombrage
Il opta pour le whisky
Et pour un autre emballage
Un torero aux yeux gris

Depuis, dans le jardinage,
J'ai noyé toutes mes envies
Et depuis je ne voyage
Qu'au milieu des salsifis

Hobbies, hobbies, hobbies, hobbies, hobbies
Chacun ses tics, chacun ses tocs
Chacun ses tocs, chacun ses tics

PARFUM D'AMBRE

Tu as laissé ton parfum d'ambre
Flotter dans un coin de la chambre
Un vieux roman d'Aldous Huxley
Et ton trousseau de clés

Tu as laissé le cachemire usé
Que j' t'avais offert à Jersey
Celui qui est tout râpé aux coudes
Un ticket de fast-food

Mais c' qui m' chagrine
C'est un vieux slow qui tourne en rond
Sur la platine
Qui tourne en rond sur la platine

Tu as emporté, ça c'est une chance !
La grosse pendule qui s'en balance
Et la Vénus en bois des îles
Ramenée du Brésil

Tu as emporté mes Fats Waller
Et une aquarelle sans valeur
Ton bric-à-brac, quelques bricoles
Ma dernière clé de sol

Mais c' qui m' fait mal
C'est mon amour qui s' fait la malle
Qui s' fait la malle
C'est mon amour qui s' fait la malle

Tu as emporté mes Fats Waller
Et une aquarelle sans valeur
Ton bric-à-brac, quelques bricoles
Ma dernière clé de sol

Mais c' qui m' chagrine
C'est un vieux slow qui tourne en rond
Sur la platine
Qui tourne en rond sur la platine

Mais c' qui m' fait mal
C'est toute ma vie qui s' fait la malle
Qui s' fait la malle
C'est toute ma vie qui s' fait la malle
Qui s' fait la malle

MYSTIQUE OU ÉROTIQUE

Jésus a jasé
Bouddha a boudé
Moi, je cherche auquel
De tes seins me vouer

Sur l'autel sacré
De ton corps sucré
Je touche au mystère
Enfin révélé

Mystique
Ou érotique
Dis-moi ce qu'est l'amour
Mon amour, mon amour

Mon tao, c'est toi
Je trouve ma voie
Quand ta porte étroite
J'entrouvre sans hâte

Et sous la Grande Ourse
Tu chantes louanges
Aux Cieux tandis que
Je bois à la source

Mystique
Ou érotique
Dis-moi ce qu'est l'amour
Mon amour, mon amour

Érotique
Ou mystique
Dis-moi ce qu'est l'amour
Mon amour, mon amour

Mystique
Érotique
Dis-moi ce qu'est l'amour
Mon amour, mon amour

Érotique
Et mystique
Voilà ce qu'est l'amour
Mon amour, mon amour

ASSEZ

Elle s'appelait Cécile
Et la pluie sous ses cils
Se mêlait à l'eau des averses
Quand elle rentrait par la traverse

Il la voulait docile
Frapper, c'était facile
Les coups pleuvaient dans la maison
Où l'homme avait toujours raison

Assez ! Assez ! Assez !
De tous ceux qui lèvent la main
Assez ! Assez ! Assez !
De ceux qui s'en lavent les mains
Ici ou ailleurs
La même douleur
Et la peur

Assez ! Assez ! Assez !
De tous ces tyrans déguisés
En pères ou en maris
En patrons, gentils fiancés

On a trouvé Cécile
Endormie sous ses cils
Un jour, dans la grande maison
Où l'homme avait toujours raison

Sa jeunesse immobile
Notre rage inutile
Trois lignes en petits caractères
Dans la rubrique des faits divers

Assez ! Assez ! Assez !
Derrière un voile ou un volet
Assez ! Assez ! Assez !
De ces vies de femmes volées
Hier, aujourd'hui
La même folie
Et l'oubli

Assez ! Assez ! Assez !
Djamila tombée sous les pierres
Le cœur, le corps brisés
Sous l'œil exalté de ses frères

Elle s'appelait Cécile
Et la pluie sous ses cils
Se mêlait à l'eau des averses
Quand elle rentrait par la traverse

Elle s'appelait Cécile